La Québécoise Luciana Coura Vivia, originaire du Brésil, avec son garçon Tiago, 13 ans, et sa fille Maria Luiza, 10 ans, est arrivée ici avec son mari en 2017. Elle a reçu son Certificat de sélection du Québec en 2018, mais n’a toujours pas sa résidence permanente.

FRANCIS HALIN

Des travailleurs qualifiés en attente de leur résidence permanente qui ne demandent qu’à vivre et travailler en français ici n’en peuvent plus de faire les frais de la guerre Québec-Ottawa.

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« C’est très étrange parce que ce retard arrive seulement avec le Québec. On sait qu’il y a toujours des bisbilles entre Québec et le fédéral, mais là, on ne sait plus qui croire », a déploré Luciana Coura Vivia, conseillère en communications pour le géant de l’agroalimentaire Jefo, à Saint-Hyacinthe.

Pour celle qui en est presque à 33 mois d’attente, après avoir immigré ici avec son mari français gestionnaire de centre de données, la chicane a assez duré.

« C’est drôle parce que mon rôle en entreprise est justement d’attirer des travailleurs qualifiés, et c’est moi qui suis prise là-dedans », a-t-elle lancé.

Hier, le premier ministre du Québec, François Legault, a décoché une flèche bien sentie au gouvernement Trudeau en l’accusant de retarder l’arrivée de plus de 50 000 travailleurs qualifiés en pleine pénurie de main-d’œuvre.

« On a fixé les seuils et on n’atteint pas les seuils. Il y a un backlog d’à peu près 50 000 dossiers à Ottawa », a-t-il dénoncé en réaction à un article de Radio-Canada faisant étant « d’une pause » du fédéral mise en place en 2019. 

La faute d’Ottawa

Au 28 avril 2021, plus de 51 446 personnes attendaient toujours d’être admises par Ottawa.

« Obtenir toutes les approbations du fédéral, ça prend 27 mois, alors que dans les autres provinces, c’est six mois », a répondu M. Legault quand on lui a demandé de réagir au fait que des infirmières boudent le Québec pour l’Ontario.

« Nous, donner un Certificat de sélection du Québec (CSQ), c’est en moyenne 31 jours. Donc l’année passée, on a été très en bas du seuil que l’on s’était fixé à cause du gouvernement fédéral », s’est désolé François Legault. 

Hier, des voix patronales ont pointé du doigt ce conflit, qui saigne l’économie.

« La vraie lenteur vient de la guerre fédéral-provincial. On a un problème de seuil au Québec et de traitement à Ottawa », a dénoncé Charles Milliard, PDG de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ). 

« On assiste à une querelle de juridictions. C’est un peu gênant parce que ces travailleurs-là sont ici », a ajouté Karl Blackburn, PDG du Conseil du patronat (CPQ).

En fin de journée, Alexander Cohen, attaché du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté (IRCC), Marco E. L. Mendicino, a renvoyé la balle au gouvernement Legault.

« Notre inventaire du Programme des travailleurs qualifiés du Québec (PTQQ) est d’environ 50 000 personnes, mais les seuils d’immigration de Québec, en 2021, sont d’environ 27 000 personnes. Nous ne pouvons pas traiter plus de demandes que les espaces permis par Québec », a-t-il souligné.

— Avec la collaboration de Guillaume St-Pierre