L’entreprise privée pourrait prendre en charge la gestion des nombreux sites de quarantaine au Canada, qui sont actuellement administrés par l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC).

Ottawa aimerait ainsi réaliser des économies et des gains d’efficience. Une approche qui soulève les craintes de l’opposition au Parlement.

Depuis le début de la pandémie, 3922 personnes ont résidé dans les centres de quarantaine supervisés par le gouvernement fédéral parce qu’elles n’avaient pas d’option convenable pour s’isoler à leur entrée au Canada. 

Au mois d’août, le gouvernement fédéral a dépensé environ 37 millions de dollars pour couvrir les coûts des quarantaines sur l’ensemble des 11 sites au Canada.

En prévision d’un assouplissement éventuel des restrictions à la frontière et d’une augmentation de l’afflux de voyageurs, le gouvernement aimerait profiter de l’occasion pour étendre les installations de quarantaine à neuf villes supplémentaires, comme Windsor, Niagara, Québec, Ottawa, Charlottetown et Winnipeg.

L’ASPC a soumis en ligne une demande de renseignements, une sorte d’appel d’intérêt préliminaire, à l’industrie pour explorer ses options.

Selon le document consulté par Radio-Canada, Ottawa souhaite avoir un seul fournisseur pour toutes les installations.

L’entreprise serait chargée de gérer l’hébergement pour un maximum de 1600 personnes réparties dans tout le Canada, principalement dans les régions de Toronto, Vancouver, Calgary et Montréal. Les installations devraient se trouver, comme c’est le cas actuellement, près des aéroports ou des points d’entrée au pays.

Le mandataire serait aussi responsable du transport, de la nourriture, des soins infirmiers et de la sécurité, notamment.

Si le gouvernement fédéral privilégie une offre clé en main d’un seul joueur, il est ouvert à des propositions basées sur des modèles mixtes, partagés ou régionaux

Un porte-parole de l’ASPC explique que cette approche consolidée permettrait une réduction des coûts.

L’opposition inquiète

En contexte de pandémie, ce n’est pas le temps de faire des économies de bouts de chandelle, il faut donner de bons services publics, lance Alexandre Boulerice, chef adjoint du Nouveau Parti démocratique (NPD). 

Il craint que le secteur privé finisse par tourner les coins ronds et diminuer la qualité des services pour augmenter sa rentabilité.

Il me semble qu’on aurait dû apprendre des CHSLD privés et des expériences qu’on a vues au Québec.

Si Ottawa choisit cette voie, il doit veiller à ce que la surveillance et l’application des règles sanitaires soient strictement maintenues, selon les conservateurs.

Sur les sites de quarantaine, ça prendrait des agents, soit des policiers, soit des représentants de Santé Canada, pour s’assurer de bien contrôler les gens qui sont mis en quarantaine obligatoire, a déclaré le député Pierre Paul-Hus. 

Le Bloc québécois soulève une autre source d’inquiétude. Si le gouvernement désire réellement sous-traiter la sécurité aux frontières et confier au privé les sites de quarantaine, il devra d’abord nous expliquer comment il entend assurer la protection des données personnelles, a réagi la députée bloquiste Kristina Michaud.

En effet, la requête fédérale prévoit que le fournisseur choisi serait responsable de la collecte de données et de la production de rapports, y compris la tenue de dossiers pour tous les voyageurs hébergés.

Divers scénarios envisagés

Une passagère masquée à l'aéroport de Vancouver.

Une passagère masquée à l’aéroport de Vancouver

Photo : Radio-Canada / Ben Nelms

L’ASPC dit vouloir être proactive, souple, et se préparer à divers scénarios. Les besoins en matière d’installations de quarantaine pourraient augmenter avec l’éventuel assouplissement des restrictions de voyage et l’augmentation du nombre de voyageurs, souligne son porte-parole.

Une fois le processus de demande de renseignements terminé, le 19 octobre, le gouvernement étudiera les suggestions provenant de l’industrie et décidera si le choix du privé est une stratégie viable. Dans l’affirmative, un appel d’offres formel serait déclenché pour l’attribution potentielle d’un contrat à un fournisseur en mars 2021. 

Le bureau de la ministre fédérale de la Santé a refusé d’accorder une entrevue à Radio-Canada à propos de cette démarche.

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