Depuis son élection comme chef du Parti conservateur du Canada (PCC), Erin O’Toole joue de prudence. Son discours s’est recentré. Son but : courtiser un électorat au-delà des membres conservateurs. Par contre, ceux qui lui ont permis de remporter la course veulent s’assurer de ne pas être oubliés.

Les militants pour les droits des propriétaires d’armes à feu sont très mobilisés sur les médias sociaux.

L’annonce du gouvernement Trudeau faite pendant la pandémie sur l’interdiction des armes de style militaire leur a donné une motivation supplémentaire.

Là, le tir sportif, c’est terminé pour les propriétaires d’armes de type AR, comme les AR15, si les libéraux vont de l’avant avec l’interdiction des armes de poing. Le tir sportif au Canada, c’est terminé à tout jamais, affirme, découragé, le président du groupe Tous contre un registre québécois des armes à feu, Guy Morin.

Pendant la course à la chefferie du PCC, il a lancé un appel sur les réseaux sociaux pour inviter ses membres à acheter une carte de membre pour mettre de la pression sur les candidats.

Le but, au départ, c’était de lancer un message, comme quoi les propriétaires d’armes à feu, on n’est pas acquis au Parti conservateur, raconte-t-il. Si on ne nous parlait pas, on n’était pas obligé de se lever à la prochaine élection.

Marc-Antoine Dolbec a été un de ceux qui ont répondu à son appel.

C’est la première fois que je suis membre d’un parti au fédéral et au provincial aussi, précise-t-il.

Il espère maintenant que le nouveau chef conservateur va battre les libéraux à la prochaine élection et qu’il pourra, en plus de rétablir la santé fiscale du pays, redonner aux propriétaires d’armes à feu leurs droits.

Je pense que les propriétaires d’armes à feu ont joué vraiment un gros rôle.

M. Morin ne cache pas sa passion pour le tir sportif. Parmi ses nombreuses armes, plusieurs sont maintenant interdites et les posséder après le printemps 2022 sera illégal. On est écœuré de tout le temps, tout le temps, perdre des droits, dit-il.

Pourquoi O’Toole?

Des armes sont disposées sur la table, tandis que Guy Morin est debout à l'arrière de celle-ci.

Guy Morin souhaite qu’un gouvernement conservateur revoie la Loi sur les armes à feu.

Photo : Radio-Canada

Pendant la course à la direction, l’équipe d’Erin O’Toole ne s’est pas caché d’avoir le soutien des militants proarmes. Son actuel directeur de campagne, Fred DeLorey, a d’ailleurs été lobbyiste pour l’Association canadienne pour les armes à feu.

Guy Morin s’est également prononcé publiquement en faveur d’Erin O’Toole parce que dans sa plateforme, il promet de renverser les réformes libérales, dont l’interdiction des armes à feu de style militaire, mais aussi de revoir la Loi sur les armes à feu.

Ce qu’on souhaite, c’est rouvrir cette loi et enlever tout ce qui n’est pas nécessaire et nuit au tir sportif, aux chasseurs et aux propriétaires d’armes à feu et qui ne change absolument rien, explique M. Morin. Enlever tout ça et refaire la loi comme du monde.

Erin O’Toole n’a pas voulu prendre d’engagement formel lors de son point de presse mercredi.

J’ai lancé une plateforme politique pendant la course à la chefferie, a-t-il dit. C’est sur l’internet maintenant. Dans le futur, on va parler de les politiques (sic) pour la prochaine élection, mais j’ai proposé quelques idées qui, je pense, sont importantes pour le futur.

Marc-Antoine Dolbec veut surtout que le nouveau chef ne les laisse pas tomber afin de courtiser un électorat plus urbain.

On s’attend à ce qu’il prenne soin de nous, à ce qu’il prenne soin de notre cause, dit-il.

Guy Morin aussi va suivre les prochains pas d’Erin O’Toole. Il ne ferme d’ailleurs pas la porte à tenter sa chance comme candidat pour le PCC à la prochaine élection.

Les propriétaires d’armes à feu ne sont pas les seuls à avoir de grandes attentes envers le nouveau chef.

Les conservateurs sociaux

Hanna Kepka répond aux questions d'un journaliste à l'extérieur.

Si ce n’était des votes des Canadiens pro-vie et pro-famille, Erin O’Toole ne serait pas devenu chef du Parti conservateur, soutien Hanna Kepka, de la Coalition nationale pour la vie.

Photo : Radio-Canada

Les conservateurs sociaux, qui s’opposent par exemple à l’avortement et au mariage entre conjoints de même sexe, ne veulent pas être ignorés.

Si ce n’était des votes des Canadiens pro-vie et pro-famille, il ne serait pas devenu chef du Parti conservateur, explique Hanna Kepka, de la Coalition nationale pour la vie.

Elle rappelle qu’Erin O’Toole doit sa victoire au deuxième et troisième choix des candidats sociaux, comme Derek Sloan et Leslyn Lewis.

Si ce n’était pour ces votes-là, possiblement, Peter MacKay serait le chef de ce parti en ce moment, observe-t-elle.

Les conservateurs sociaux vont surveiller Erin O’Toole de près, écrivait le groupe Real women of Canada, dans un communiqué diffusé plus tôt cette semaine.

Et les premiers pas d’Erin O’Toole comme chef les ont rendus sceptiques.

Lors d’une conférence de presse quelques jours après sa victoire, il a assuré s’être fait élire comme un député pro-choix, et ce, même s’il avait courtisé les conservateurs sociaux pendant la campagne.

Ces propos ont fait sourciller Mme Kepka.

On peut passer outre des paroles qui, pour le moment, effectivement, nous déçoivent, dit-elle. Mais s’il pose des gestes qui démontreront qu’il est capable et qu’il est prêt à reconnaître la valeur et les droits des Canadiens pro-vie et pro-famille, je suis sûr que ces électeurs pourront le suivre.

Elle demande que M. O’Toole s’engage à ne plus financer l’avortement à l’étranger, qu’il s’oppose au projet de loi libéral contre les thérapies de conversion et qu’il offre une place de choix à Derek Sloan dans son cabinet fantôme.

Une demande à laquelle Erin O’Toole ne ferme pas la porte.

Je vais parler avec Derek sur l’avenir et on va voir, a-t-il affirmé mercredi.

Erin O’Toole devra être habile politiquement s’il veut inviter le plus grand nombre d’électeurs à l’intérieur de sa grande tente conservatrice. Il risque de devoir travailler fort pour s’assurer que ceux qui y sont déjà y restent.

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