Les policiers de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) devraient porter des caméras d’intervention, soutient Justin Trudeau, qui entend convaincre ses homologues provinciaux du bien-fondé de cette pratique.

De telles caméras offriraient un élément de transparence et de redevabilité qui, je pense, serait très important pour les corps policiers de ce pays, a plaidé le premier ministre canadien lundi, en conférence de presse.

M. Trudeau affirme qu’il a abordé directement le sujet lundi matin avec la commissaire de la GRC, Brenda Lucki, qui relève directement du gouvernement fédéral.

Les défis avec ces caméras sont plutôt d’ordre logistique ou économique, [et ne sont] pas substantiels. [Il y a] quelques défis techniques aussi. Mais je pense que nous sommes d’accord que nous devons aller de l’avant avec ces caméras pour les officiers de la GRC.

Au chapitre des défis techniques à relever, M. Trudeau a évoqué le fonctionnement de ces caméras dans des zones éloignées.

Il a aussi évoqué la nécessité d’accélérer le changement à l’intérieur de la GRC en commentant le dossier du chef Allan Adam avec la commissaire Lucki.

Ce chef de la Première Nation des Chipewyan de l’Athabasca allègue avoir été tabassé en mars par des agents de la GRC de Wood Buffalo, en Alberta. Une photo de son visage tuméfié a été diffusée par la presse en fin de semaine.

Nous avons tous été perturbés par les photos partagées par le chef Adam il y a plusieurs jours. Le ministre [des Services aux Autochtones, Marc] Miller a été en communication directe avec lui. J’en ai parlé ce matin avec la commissaire Lucki. Nous devons travailler ensemble pour accélérer le changement à l’intérieur de la GRC.

Trudeau plaidera sa cause auprès des provinces

Si le gouvernement canadien a autorité sur la police fédérale, il en va autrement pour beaucoup d’autres corps policiers, qui relèvent des provinces ou de municipalités, a cependant reconnu le premier ministre.

Donc, nous nous devons de travailler ensemble, a-t-il dit, après avoir assuré qu’il va certainement aborder le sujet avec ses homologues provinciaux jeudi lors de leur conférence téléphonique.

M. Trudeau a admis qu’il n’avait pas discuté du port de caméras avec eux la semaine dernière. Il dit avoir plutôt fait valoir qu’il importe de prendre des mesures concrètes pour que tous les Canadiens soient en sécurité.

La position du premier ministre Trudeau a été annoncée au terme d’une fin de semaine marquée par des manifestations contre le racisme dans plusieurs villes du pays.

Ce mouvement fait suite à la mort de George Floyd, un Afro-Américain qui est mort sous le genou d’un policier, le 25 mai, à Minneapolis au Minnesota.

La réalité est que beaucoup de gens dans ce pays ne se sentent tout simplement pas protégés par les policiers. En fait, ils ont peur d’eux.

La semaine dernière, le premier ministre avait déclaré sans détour qu’il existe de la discrimination systémique au Canada, et que les Canadiens racialisés, en particulier les Noirs et les Autochtones, en faisaient les frais.

Il soutenait que son gouvernement devait améliorer la situation, mais était demeuré muet sur les gestes concrets qu’il entendait poser.

Trudeau s’explique sur son genou posé au sol

Le premier ministre a par ailleurs expliqué sa décision de poser un genou au sol vendredi, à Ottawa, à l’occasion d’une marche dénonçant le racisme.

Pour moi, ça signifie avoir du respect pour les gens en train de manifester autour de moi, d’indiquer que tout n’est pas correct, qu’on a un système qui continue de discriminer contre les gens noirs, les gens racialisés, les Autochtones, a-t-il dit.

Justin Trudeau, un genou par terre, au milieu d'une foule.

Justin Trudeau s’est agenouillé avec les manifestants antiracistes vendredi, à Ottawa.

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

Nous avons beaucoup de travail à faire encore pour que tout le monde au Canada sente qu’il vit dans le meilleur pays au monde. Ce n’est pas la réalité de trop de gens. Pour moi, me mettre sur un genou, c’est un signe de respect, de solidarité avec eux, a-t-il ajouté.

C’est le choix que j’ai fait, et je pense que c’était le bon choix.

Il a aussi fait valoir qu’il était important pour lui d’être présent pour écouter, entendre les voix de milliers de Canadiens qui veulent qu’on agisse plus rapidement, plus fermement, contre la discrimination systémique.

Il a cependant prévenu que réparer des siècles d’injustice, d’exclusion et de violence ne se fait pas du jour au lendemain, même s’il s’engage à y oeuvrer.

Justin Trudeau n’a pas exprimé de malaise lorsque des journalistes lui ont demandé s’il était convenable qu’il ait participé à cette manifestation, même si cela contrevenait aux mesures de distanciation qu’il continue de prêcher.

Il a rappelé qu’il portait un masque et qu’il avait gardé ses distances avec les autres le plus [qu’il] pouvait, mais a reconnu que trouver un équilibre entre manifester pour une bonne cause et respecter les consignes de santé publique constituait un exercice délicat.

Le chef démissionnaire du Parti conservateur, Andrew Scheer, a quant à lui dénoncé la présence de M. Trudeau à la manifestation d’Ottawa.

Selon lui, le premier ministre a miné les messages de santé publique de son propre gouvernement. Je peux comprendre pourquoi les gens sont confus quant aux consignes à suivre, a-t-il dit.

Mettre fin à la séparation de certaines familles

M. Trudeau a par ailleurs annoncé que son gouvernement va instaurer une exemption limitée à certains Canadiens qui sont séparés de leur famille en raison de la fermeture des frontières, à la mi-mars.

Cette exemption permettra à des membres de la famille immédiate de citoyens ou de résidents permanents, comme des conjoints, des enfants et des parents d’enfants mineurs, d’entrer au Canada.

Tous ces gens devront cependant s’isoler complètement pendant 14 jours après leur arrivée en sol canadien, comme toute personne qui entre au pays en ce moment.

On veut évidemment que les familles soient ensemble, mais notre priorité demeure la sécurité des Canadiens, a expliqué le premier ministre.

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