Les chefs des deux principaux partis de la Saskatchewan ont participé pour la première fois à un débat depuis qu’ils ont été nommés à la tête de leur formation politique. C’était une occasion pour le public de mieux connaître ces deux aspirants premiers ministres, croient des experts.

Scott Moe a pris les rênes du Parti saskatchewanais en 2018, après le retrait de la vie politique de Brad Wall, qui en était à son troisième mandat à la tête du parti. La même année, Ryan Meili a remporté la course à la chefferie du Nouveau Parti démocratique (NPD) de la Saskatchewan.

Il sera intéressant de voir de quelle manière les deux chefs se comporteront lors du débat.

Selon Howard Leeson, qui est professeur émérite à l’Université de Regina, le débat de mercredi revêt une importance supplémentaire, puisque les électeurs ont moins l’occasion de rencontrer et d’interagir avec les chefs en raison de la pandémie de COVID-19.

C’est une campagne complètement différente de ce que nous avons vécu jusqu’à présent. Même au sein d’un parti, les candidats et leurs équipes se réunissent beaucoup moins qu’à l’habitude. Les électeurs reçoivent beaucoup de publicités à la télévision et sur les médias sociaux. Je pense que le débat aura plus d’impact que lors des dernières élections, affirme-t-il.

La COVID-19 au coeur du débat

Un peu plus de sept mois après le début de la pandémie de COVID-19, ce thème a occupé une bonne partie du débat.

Le débat est l’occasion pour les chefs de répondre aux questions et aux préoccupations des électeurs en ce qui a trait à la gestion de la crise sanitaire. Celui qui pourra convaincre l’électorat que son plan est le meilleur sera le grand gagnant de la soirée, dit le directeur du bureau saskatchewanais du Centre canadien de politiques alternatives, Simon Enoch.

Alors que la Saskatchewan enregistre une hausse de cas de COVID-19 et semble se diriger vers une seconde vague de la maladie, Scott Moe a dû défendre les décisions prises par son gouvernement.

Le premier ministre sortant a rappelé que le médecin hygiéniste en chef de la province, Saqib Shahab, a imposé une nouvelle limite sur le nombre de personnes dans les rassemblements privés à domicile. Celui-ci passera de 30 à 15 personnes dès vendredi.

Ryan Meili et Scott Moe lors du débat des chefs.

Il s’agissait d’un premier débat pour Scott Moe et Ryan Meili depuis qu’ils sont à la tête de leur parti.

Photo : La Presse canadienne / Michael Bell

Ryan Meili a pour sa part tenté de diminuer la confiance du public envers le gouvernement sortant en s’attaquant aux mesures sanitaires mises en place par le Parti saskatchewanais.

Il déplore notamment que la nouvelle limite de rassemblement ne s’applique pas également aux salles de classe de la province. Une mesure qui, selon lui, assurerait la protection des élèves et du personnel enseignant.

Quant à la question du port du masque, Ryan Meili a attaqué le gouvernement sortant sur la clarté des directives relatives aux moments et aux endroits où le couvre-visage est obligatoire. Le chef néo-démocrate n’a cependant pas indiqué s’il rendrait le port du masque obligatoire s’il était élu.

Scott Moe a répondu que son parti avait été clair depuis le début de la pandémie. Le premier ministre sortant a rappelé que le masque ou le couvre-visage doit être porté lorsque la distanciation physique n’est pas possible.

Économie : équilibre budgétaire et salaire minimum

Sur la question de l’économie, le premier ministre sortant a promis qu’un gouvernement du Parti saskatchewanais atteindrait l’équilibre budgétaire d’ici 2024. Scott Moe a accusé le chef néo-démocrate de dépenser sans réfléchir.

Ryan Meili a pour sa part souligné que la Saskatchewan est en déclin depuis que le Parti saskatchewanais est au pouvoir, ajoutant que Scott Moe prône l’austérité.

Il a réitéré qu’un gouvernement néo-démocrate augmenterait le salaire minimum de la province. Pour lui, l’augmentation de 13 cents du mois de juin a été une véritable claque au visage des Saskatchewanais, surtout alors que de nombreuses personnes ont subi de durs coups financiers liés à la pandémie.

Scott Moe lors d'une annonce électorale le 30 septembre 2020 (archives).

Scott Moe est devenu le 15e premier ministre de la Saskatchewan le 2 février 2018 (archives).

Photo : La Presse canadienne / Liam Richards

Le chef du NPD accuse également son homologue de n’engager que très rarement des entreprises saskatchewanaises lors de méga projets d’infrastructures.

Scott Moe a répliqué que la croissance économique de la Saskatchewan était l’une des meilleures au pays dans les dernières années. Il a ajouté que la construction du projet de la voie de contournement de Regina a été faite à 70 % par des entreprises de la province.

Le chef du Parti Saskatchewanais préfère se concentrer sur des investissements dans les infrastructures de la province, que ce soit les écoles, les hôpitaux ou les routes.

Quelques promesses pour les Fransaskois

Peu importe qui remportera le scrutin du 26 octobre, la communauté fransaskoise devrait être bien desservie par le prochain gouvernement saskatchewanais. Du moins c’est ce qu’ont souligné les deux chefs lors de la mêlée de presse qui a suivi le débat.

Scott Moe s’engage notamment à analyser les besoins en infrastructures scolaires des Fransaskois, non seulement à Regina, Prince Albert et Saskatoon, mais dans toute la province.

Pour sa part, Ryan Meili promet qu’un gouvernement néo-démocrate communiquera rapidement avec la communauté fransaskoise pour analyser les besoins en écoles francophones. Le chef du NPD promet également que le français sera plus accessible dans les services gouvernementaux, que ce soit en santé, en éducation ou du côté du système judiciaire.

Le NPD espère faire des gains grâce au débat

Le professeur de sciences politiques et d’études internationales à l’Université de Regina Tom McIntosh croit que le débat est particulièrement important pour le chef néo-démocrate, Ryan Meili.

Selon lui, le NPD a besoin de démontrer à la population saskatchewanaise qu’il est une option de rechange légitime au gouvernement sortant.

Le chef du Nouveau Parti démocratique de la Saskatchewan en conférence de presse le 7 octobre 2020.

Ryan Meili s’engage notamment à réduire le temps d’attente pour les chirurgies dans la province (archives).

Photo : Radio-Canada / Matt Duguid

De nombreux électeurs ne connaissent toujours pas Ryan Meili. Le débat leur permettra de savoir qui il est. Il leur permettra également de vérifier si Scott Moe est bien celui qu’ils pensent connaître, explique Tom McIntosh.

De récents sondages effectués par la firme Research Co. montrent que le public semble faire plus confiance à Scott Moe qu’à Ryan Meili. Selon le sondage, 65 % des répondants estiment avoir une opinion positive du premier ministre sortant, contre seulement 45 % pour le chef néo-démocrate.

La firme a également constaté que l’opinion des électeurs envers Scott Moe s’est améliorée depuis le début de la campagne, alors que c’est le contraire du côté de Ryan Meili.

Les sondages donnent le Parti saskatchewanais gagnant

L’analyste des sondages de CBC, Éric Grenier, rappelle que les débats des dernières élections n’ont pas vraiment modifié l’opinion publique en Saskatchewan avant le jour du scrutin. Ryan Meili tentera donc de faire ce qu’aucun de ses prédécesseurs n’a pu faire avant lui, soit changer l’élan du vote avant le 26 octobre.

Éric Grenier indique qu’à l’heure actuelle le Parti saskatchewanais est en avance de 19 à 22 points de pourcentage dans les sondages. Le parti de Scott Moe remporterait de 39 à 49 sièges, ce qui est bien plus que le seuil de 31 sièges nécessaires pour former la majorité.

C’est un grand écart à combler en quelques semaines seulement pour le NPD. Bien que les néo-démocrates soient à égalité avec le Parti saskatchewanais à Regina, il tire de l’arrière à Saskatoon et se trouve loin derrière dans le reste de la province.

La clé d’un débat productif

Howard Leeson, Tom McIntosh et Simon Enoch croient que, pour que le débat soit productif, Scott Moe et Ryan Meili doivent éviter les échanges cacophoniques qui ont caractérisé le premier débat dans la course à la présidence américaine entre Donald Trump et Joe Biden.

Personne n’est sorti gagnant de cet exercice. Je ne m’attends toutefois pas à ce genre de performance de la part de Scott Moe et de Ryan Meili. J’espère que nous aurons un débat constructif où les chefs nous parleront de leurs idées et de leurs projets, conclut Simon Enoch.

Au final, le débat entre les deux chefs saskatchewanais s’est fait dans le respect du temps alloué et sans interruption cacophoniques.

Avec les informations de Nicholas Frew, Éric Grenier et Emmanuelle Poisson

Élections Saskatchewan 2020
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