Le ministre du Travail, Jean Boulet, se dit « sensible » aux inquiétudes des travailleurs agricoles souffrant du parkinson à cause des pesticides qui ont pris la parole, lundi, pour réclamer que ce soit reconnu comme étant une maladie professionnelle.
Tu vois que tes capacités sont réduites d’année en année […] Je vois ce qu’il va arriver et c’est affreux
, raconte en pleurs Elizabeth McNamara, 70 ans, agricultrice à la retraite en Outaouais. Elle ne peut déjà plus bouger son bras droit.
Elle et son ancien conjoint utilisaient souvent du glyphosate et de l’atrazine dans leur ferme laitière. Ils souffrent tous les deux de la maladie.
J’espère juste que mes enfants n’auront pas la maladie. C’est toujours possible, puisqu’ils ont travaillé sur la ferme.
Je veux juste que le monde soit conscient […]
, dit Elizabeth McNamara, que les agriculteurs changent leurs méthodes et diminuent leur utilisation de pesticides
.
Avec d’autres travailleurs agricoles, elle a témoigné à l’occasion du lancement de la nouvelle association Victimes de pesticides du Québec.
Je n’ai pas voulu que cette maladie s’introduise en moi
, raconte avec émotion Serge Boily, 54 ans. Son travail, avant de tomber malade, consistait à asperger des pesticides en milieu urbain. S’il avait su, à l’époque, il n’en aurait probablement pas utilisé.
70 % plus de risques d’avoir la maladie
Maryse Bouchard, professeure de santé environnementale à l’École de santé publique de l’Université de Montréal.
Photo : Radio-Canada / Thomas Gerbet
Des dizaines d’études scientifiques ont démontré un lien entre la maladie de Parkinson et l’exposition aux pesticides, rappelle la professeure de santé environnementale à l’École de santé publique de l’Université de Montréal Maryse Bouchard.
Des pays comme la France l’ont même désignée depuis plusieurs années comme maladie professionnelle chez les agriculteurs.
Les personnes qui sont exposées aux pesticides pendant plusieurs années, ça augmente leur risque de 70 % de développer la maladie de Parkinson.
L’opposition presse Québec d’agir
Aujourd’hui, on sait des choses qu’on ne savait pas à l’époque
, rappelle Marie Montpetit, porte-parole libérale en matière de santé.
C’est la responsabilité de l’État de s’assurer que les travailleurs agricoles aient droit à une compensation.
Tous les partis d’opposition demandent au gouvernement de reconnaître sans tarder la maladie de Parkinson comme une maladie professionnelle. La liste des maladies reconnues n’a pas été revue depuis 1985 au Québec.
Le Parti québécois (PQ) et Québec solidaire (QS) s’inquiètent des pressions que le gouvernement pourrait subir de la part de l’industrie dans ce dossier.
Est-ce que le gouvernement va se ranger encore une fois du côté des intérêts de l’industrie des pesticides plutôt que de ceux du public?
, demande la porte-parole de QS en matière d’agriculture, Émilise Lessard-Therrien.
C’est là qu’on va voir si le gouvernement est à l’écoute de la population ou à l’écoute des lobbys
, ajoute Sylvain Roy, porte-parole du PQ en matière d’agriculture.
Un projet de loi « sous peu »
Nous sommes sensibles aux inquiétudes de la population en lien avec l’utilisation des pesticides dans le secteur agricole, notamment sur son impact sur les travailleurs de ce secteur
, écrit dans un courriel le cabinet du ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet.
M. Boulet devrait déposer sous peu un projet de loi modernisant le régime de santé et de sécurité dont l’annexe concernant les maladies professionnelles n’a pas été revue depuis 35 ans.
Impossible pour le moment de savoir si la maladie de Parkinson fera partie de la nouvelle liste.
Avec la collaboration de Gabrielle Proulx