Le gouvernement de Justin Trudeau est à nouveau appelé à intervenir dans le dossier des enfants de ressortissants canadiens qui ont décidé d’aller grossir les rangs du groupe armé État islamique (EI) en Syrie, et qui se retrouvent aujourd’hui coincés dans des camps de réfugiés, sans aide consulaire du Canada.

L’avocat spécialisé en immigration Stéphane Handfield a reproché au gouvernement canadien de ne poser aucun geste pour octroyer la citoyenneté aux enfants qui, d’office, sont Canadiens.

Pire, il met des bâtons dans les roues, ce qui fait qu’aujourd’hui, officiellement, les enfants canadiens sont apatrides, a-t-il dénoncé lundi matin, lors d’un point de presse.

À ses côtés, le député néo-démocrate Alexandre Boulerice a appuyé sa démarche, jugeant que l’inaction d’Ottawa porte préjudice à la réputation du Canada sur la scène internationale.

Pour des préoccupations humanitaires et humaines de base, on doit agir et on doit demander au gouvernement libéral à Ottawa de faire plus, a lancé M. Boulerice.

Après que les combats eurent cessé entre le groupe armé État islamique et la coalition internationale, au début 2019, des enfants ont été faits prisonniers et se trouvent désormais dans des camps de détention dans le nord-est de la Syrie – une situation qu’ont mise en lumière Leïla Sakhir, dont le frère a quitté le Canada pour se joindre à l’EI, et le journaliste Raed Hammoud dans le documentaire Les poussières de Daech.

La violence, l’insalubrité et la famine règnent dans ces camps, où se trouvent 26 enfants canadiens, selon l’ONG Human Rights Watch (HRW). De ce nombre, 13 ont moins de 6 ans, et certains n’ont pas encore deux ans, a affirmé Me Handfield.

Dans son rapport, publié en juin dernier, HRW écrivait que le Canada semble refuser toute aide consulaire effective aux détenus en raison de leurs liens présumés avec l’EI, ce qui pourrait constituer une discrimination illégale. Les autorités kurdes, qui s’occupent de ces camps, manquent de ressources et ont exhorté les pays à rapatrier leurs ressortissants, indiquait encore l’organisation.

Au nom des familles touchées et des citoyens canadiens indignés, nous mettons le gouvernement de Justin Trudeau face à ses contradictions et lui demandons ce qu’il entend faire pour porter urgemment secours à ces enfants canadiens prisonniers dans les camps syriens et dont la vie est menacée.

Le premier ministre Trudeau, qui dit reconnaître qu’il s’agit d’une situation délicate, a assuré qu’il était impossible pour l’heure d’envoyer des diplomates canadiens dans ces camps pour faire reconnaître la citoyenneté de ces enfants, et ainsi les rapatrier au pays.

Pour venir en aide à ces enfants, l’une des options qui s’offrent au gouvernement canadien, selon Me Handfield, serait en effet d’envoyer une délégation diplomatique pour faire reconnaître la citoyenneté des enfants canadiens sans papiers. Selon l’avocat, Ottawa prétend à tort qu’il serait dangereux de se rendre sur place, alors qu’une vingtaine de pays l’ont fait pour rapatrier leurs ressortissants.

Qui plus est, l’équipe de documentaristes derrière Les poussières de Daech a visité ces camps, a-t-il expliqué. En plus, ils ont rencontré de hauts dirigeants en Syrie qui confirment attendre les Canadiens à bras ouverts afin que les enfants soient rapatriés, mais le Canada ne bouge pas.

Le gouvernement « se réfugie derrière des considérations de sécurité qui, on le voit bien, ne tiennent pas la route », a ajouté de son côté M. Boulerice.

Pour le lieutenant du Nouveau Parti démocratique au Québec, le Canada est dans l’obligation d’agir, de par le fait qu’il a signé deux conventions internationales qui interviennent précisément dans le dossier des enfants-réfugiés : la Convention sur la réduction des cas d’apatridie, en 1961, et la Convention relative aux droits de l’enfant, en 1989.

La députée néo-démocrate Jenny Kwan, qui est porte-parole en matière d’immigration, a écrit à sept reprises aux ministres fédéraux Marco Mendicino et François-Philippe Champagne, avec en copie conforme Justin Trudeau, depuis un an et demi, selon M. Boulerice. On reçoit comme réponses simplement des banalités, a-t-il déploré.

Il y a une urgence humanitaire là-bas, dans les camps de réfugiés contrôlés par les Kurdes, pour ces enfants-là, et ça devrait faire en sorte qu’il y ait ici un sentiment d’urgence politique, a-t-il plaidé.

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