Trois sièges : c’est tout ce qui se dresse entre Blaine Higgs et un gouvernement majoritaire lors des élections provinciales de 2018 au Nouveau-Brunswick. Si les progressistes-conservateurs peuvent conserver tous les sièges qu’ils ont remportés lors de ce scrutin, c’est tout ce qui s’interposera entre Higgs et un gouvernement majoritaire le 14 septembre.

Alors, où le premier ministre sortant peut-il trouver ces trois sièges ? Et où le chef libéral Kevin Vickers doit-il chercher à gagner du terrain pour espérer former son propre gouvernement? L’analyste des sondages à CBC, Eric Grenier, fait le point sur la situation.

Il n’est pas certain que les progressistes-conservateurs pourront gagner les 22 sièges qu’ils ont remportés en 2018. Robert Gauvin a été élu dans la circonscription de Shippagan-Lamèque-Miscou en grande partie grâce à sa feuille de route personnelle, mais il a quitté le cabinet et le caucus du parti en février en raison de l’annonce de la fermeture de six services d’urgence de nuit – annonce qui ne s’est finalement pas concrétisée.

M. Gauvin se présente maintenant pour les libéraux dans la circonscription de Baie-de-Shédiac-Dieppe et le parti de Blaine Higgs aura du mal à faire élire leur candidat dans Shippagan-Lamèque-Miscou, selon Eric Grenier.

Cela porte à quatre le nombre de sièges que les bleus auraient à gagner pour être majoritaires.

Quelles circonscriptions pour une majorité bleue?

En utilisant le modèle de projection des sièges conçu par CBC (Nouvelle fenêtre), il est possible de déterminer les sièges que les progressistes-conservateurs ont le plus de chances de gagner.

En tête de liste figurent deux sièges remportés de justesse par les libéraux en 2018. Carleton-Victoria a été remporté par seulement 3,2 % du vote, tandis que Saint John Havre a été remporté de justesse par 10 voix. Avec les libéraux en baisse et les conservateurs en hausse dans les sondages provinciaux depuis les dernières élections, ces deux sièges pourraient être les premiers à changer de main, selon l’analyste.

Puis, l’Alliance des gens du Nouveau-Brunswick a remporté la circonscription de Fredericton-York avec une avance de seulement 2,8 % lors des dernières élections. Depuis, les intentions de vote en faveur de l’Alliance ont diminué de moitié. Il leur sera donc difficile de conserver ce siège, ce qui pourrait bénéficier aux conservateurs, estime Eric Grenier.

Avec ces trois circonscriptions, les progressistes-conservateurs occuperaient 24 sièges à l’Assemblée législative, ce qui signifie qu’il ne leur en manquerait qu’un pour atteindre la majorité.

Il pourrait s’agir de la circonscription de Fredericton-Nord ou de celle de Victoria-La Vallée, présentement représentées par des libéraux, avance Eric Grenier.

Les bleus ont perdu ces sièges par moins de 5 % des votes aux mains des libéraux. L’avantage dans Fredericton-Nord, c’est que l’Alliance des gens avait obtenu 21 % des voies et les progressistes-conservateurs pourraient assurément bénéficier de leur baisse de popularité.

Avec ces deux sièges, le parti de Blaine Higgs ferait élire 26 candidats, ce qui donnerait à leur gouvernement majoritaire une certaine stabilité.

Les progressistes-conservateurs pourraient se tourner vers Moncton-Est et Moncton-Sud à titre de police d’assurance supplémentaire. Les libéraux ont gagné ces circonscriptions par des marges relativement importantes en 2018 : 11 % et 15 % respectivement, mais avec la différence de 13 % dans les intentions de vote que le modèle de projection estime entre les deux partis à l’échelle de la province, la victoire semble possible pour le parti de Blaine Higgs.

Fredericton-Grand Lac, la circonscription représentée par le chef de l’Alliance des gens Kris Austin, pourrait également être à la portée des conservateurs, estime l’analyste, si la forte diminution du soutien à l’Alliance dans toute la province se reflète dans cette circonscription.

Au-delà de ces sièges, les options possibilités de gain de sièges sont assez minces pour le leader conservateur, dit Eric Grenier.

Les libéraux doivent défendre leurs sièges avant de voir plus grand

Les libéraux ont un chemin encore plus escarpé devant eux pour arriver au pouvoir compte tenu de leur position dans les sondages. Même une petite avance sur les progressistes-conservateurs pourrait ne pas être suffisante afin qu’ils forment le gouvernement en raison de la répartition du vote.

Même en supposant que les libéraux soient capables de conserver leurs 21 sièges, bien que cela ne soit pas facile puisque les progressistes-conservateurs sont en avance pour plusieurs de ces sièges, il leur manquerait encore quatre sièges pour obtenir une majorité.

Deux sièges sont des cibles parfaites pour les libéraux, d’après Eric Grenier. Bien que Robert Gauvin se présente ailleurs, le parti devrait se faire élire dans Shippagan-Lamèque-Miscou. Miramichi, la circonscription dans laquelle Kevin Vickers se présente, serait le second siège. Il devra cependant faire face à Michele Conroy, de l’Alliance des gens, ce qui n’est pas du tout évident.

Kevin Vickers répond à une question des médias. Il est à l'extérieur sous un sapin et près d'un cours d'eau.

Kevin Vickers, chef du Parti libéral du Nouveau-Brunswick, le 29 août 2020 à Miramichi.

Photo : Radio-Canada

Ces deux sièges donneraient 23 circonscriptions aux libéraux, qui pourraient alors être en mesure de former un gouvernement minoritaire. Ils auraient besoin d’au moins deux sièges supplémentaires si l’objectif est une majorité.

Leurs meilleures options se trouveraient dans le sud-est de la province, selon l’analyse d’Eric Grenier. Les sondages démontrent que les libéraux sont en troisième position à Fredericton et dans les environs, mais ils sont beaucoup plus compétitifs dans la région de Moncton.

Si une remontée des libéraux dans les intentions de vote était due au déclin du Parti progressiste-conservateur, alors ils pourraient leur arracher les circonscriptions de Moncton Nord-Ouest et Moncton Sud-Ouest. Les bleus ont remporté ces sièges par une faible marge en 2018. Puis, la présence d’un candidat de l’Alliance des gens dans Moncton sud-ouest, contrairement à il y a deux ans, pourrait aider les libéraux, dit l’analyste.

D’autre part, si les libéraux volent des votes aux verts, ils pourraient chercher à regagner les sièges de Kent Nord et de Memramcook-Tantramar qu’ils ont perdus aux mains des verts en 2018, avance Eric Grenier.

Les Verts ont besoin des votes des deux partis en tête s’ils veulent gagner

Remporter de nouveaux sièges pour le leader des verts David Coon ne sera pas chose facile. Son parti en a gagné trois en 2018, mais n’a terminé en seconde position que dans deux autres : Restigouche-Ouest et Restigouche-Chaleur. Les verts ont terminé à 21 et 54 points, respectivement, derrière les libéraux dans ces deux circonscriptions. Le parti devra faire de très bons scores chez les francophones de la province afin de pouvoir se lancer dans la compétition dans ces circonscriptions, prévient Eric Grenier.

Fredericton, où les verts ont remporté un siège aux élections fédérales d’octobre 2019, est plus prometteur, mais seulement si le soutien aux progressistes-conservateurs diminue. Les sondages suggèrent que les bleus ont soutiré beaucoup de partisans à l’Alliance des gens dans la ville et ses environs. Si ces intentions de vote se concrétisent le jour des élections, les verts auront du mal à remporter de nouveaux sièges avec les seuls votes des libéraux, ajoute l’analyste.

David Coon, chef du Parti vert du Nouveau-Brunswick.

Les Verts devront aller chercher des votes aux libéraux et aux progressistes-conservateurs s’ils veulent faire élire plus de candidats qu’en 2018.

Photo : Radio-Canada

L’Alliance des gens doit aussi miser sur une baisse de popularité du parti de Blaine Higgs pour qu’elle puisse espérer conserver les trois sièges qu’elle a remportés lors des dernières élections. La balance du pouvoir dans un potentiel gouvernement minoritaire en dépend également.

En fin de compte, le sort des quatre partis et de leurs dirigeants pourrait se résumer à une poignée de sièges.

Le chemin vers la victoire semble toutefois plus facile pour Higgs, conclut Eric Grenier.

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