Il y a cinq mois, l’Ontario déclarait l’état d’urgence sanitaire pour limiter la propagation de la COVID-19. Avec aujourd’hui plus de 2800 décès liés au virus, des experts de la santé croient que la province aurait pu agir plus rapidement.
Le 17 mars, la vie de millions d’Ontariens a dramatiquement changé. Le premier ministre ontarien, Doug Ford, prenait une mesure décisive
en fermant toutes les bibliothèques publiques, écoles privées, garderies agréées, salles à manger des restaurants et tous les théâtres, cinémas et salles de concert, entre autres. Les rassemblements de 50 personnes ou plus étaient également interdits.
À l’époque, l’Ontario était l’épicentre de la pandémie de COVID-19 dans le pays, et le gouvernement provincial décrétait l’état d’urgence sanitaire pour faire face à cette menace de grande ampleur
.
En avril, un des scénarios de propagation présentés par Santé publique Ontario projetait qu’il y aurait 1600 morts et 80 000 personnes atteintes de la COVID-19 en Ontario.
Cinq mois après le décret, la province compte plutôt plus de 2800 morts et plus de 40 000 Ontariens qui ont contracté le virus depuis le début de la pandémie.
Le ministère de la Santé de l’Ontario précise dans un courriel envoyé à Radio-Canada qu’ans”,”text”:”en date du 10 août, l’âge moyen des patients hospitalisés pour la COVID-19 était de 68ans”}}” lang=”fr”>en date du 10 août, l’âge moyen des patients hospitalisés pour la COVID-19 était de 68 ans
.
Bilan de la pandémie en Ontario en chiffres
- Plus de 4750 personnes hospitalisées
- Plus de 1000 personnes aux soins intensifs
- Près d’un tiers des décès liés à la maladie concernent des Ontariens âgés de 80 ans et plus
Source : Santé publique Ontario
Entre le 20 mars et le 9 août, 865 patients adultes atteints de la maladie aux soins intensifs ont été placés sous assistance respiratoire
, précise Christian Hasse, porte-parole du ministère de la Santé, par courriel. Ce nombre comprend aussi les patients qui sont encore aux soins intensifs.
Leur âge moyen est de 62 ans (de 18 à 94 ans), selon le gouvernement Ford. Cet âge moyen n’inclut pas les patients qui sont encore aux soins intensifs.
jours. […] Cette durée moyenne n’inclut pas les patients qui sont encore aux soins intensifs”,”text”:”En moyenne, les adultes atteints de la COVID-19 ont été mis sous respirateur pendant 19jours. […] Cette durée moyenne n’inclut pas les patients qui sont encore aux soins intensifs”}}” lang=”fr”>En moyenne, les adultes atteints de la COVID-19 ont été mis sous respirateur pendant 19 jours. […] Cette durée moyenne n’inclut pas les patients qui sont encore aux soins intensifs
, souligne Christian Hasse.
Agir plus rapidement pour sauver des vies
La province aurait pu agir plus rapidement
, croit la directrice médicale de la prévention et du contrôle des infections du Réseau universitaire de santé (University Health Network), Susy Hota.
Elle explique que le ministère de la Santé de l’Ontario n’a pas immédiatement mis à jour les zones de voyage à risque et a aussi tardé à suivre l’évolution rapide du virus dans le monde.
Ce sont des éléments importants que nous aurions voulu voir plus tôt
, dit la Dre Susy Hota.
Selon elle, la reconnaissance du risque de voyager aurait dû être faite plus rapidement par les autorités. Elle se rappelle la confusion entourant la semaine de relâche et les nombreux déplacements qui auraient pu être évités.
C’était un peu frustrant au départ.
La Dre Hota estime que c’est à la suite de la déclaration de pandémie par l’OMS , le 11 mars dernier, que les actions ont commencé à s’enchaîner en Ontario : commandes de matériel, directives provenant du ministère de la Santé, meilleure planification.
Elle raconte que les travailleurs de la santé ont dû repenser leur manière de travailler pour continuer de soigner les patients
.
Au fur et à mesure de la pandémie, le rythme de réponse [du gouvernement et de la santé publique] s’est amélioré
, affirme-t-elle.
La crise dans les foyers de soins de longue durée
Ce n’est que le 15 avril que le gouvernement Ford instaure un décret empêchant les employés de travailler dans plus d’un foyer de soins de longue durée. La mesure était en place une semaine plus tard.
Le fait que le nombre de décès soit plus élevé que ce qui avait été estimé est sans aucun doute lié à la situation dans les foyers de soins de longue durée et les lieux d’hébergement collectif.
Avec le manque de proactivité du gouvernement ontarien dans ce dossier, plus de 400 foyers de soins de longue durée ont dû lutter contre la COVID-19 à l’intérieur de leurs murs.
Des familles manifestaient devant le centre de soins de longue durée Extendicare Guildwood, à Toronto, le 12 juin dernier.
Photo : Evan Mitsui
À ce jour, plus de 60 % des décès liés à la COVID-19 concernent des résidents de ces centres de soins pour aînés, selon les données de Santé publique Ontario.
La Dre Hota mentionne aussi les travailleurs migrants, dans les exploitations agricoles, qui vivent en collectivité. Au cours de la pandémie, la région de Windsor-Essex a été aux prises avec des éclosions de COVID-19 dans ses fermes.
Selon elle, l’Ontario devra s’attaquer à ces problèmes pour être mieux préparé
à l’avenir.
La spécialiste des maladies infectieuses croit notamment que le gouvernement devra investir davantage dans le système de santé, les foyers de soins de longue durée et les écoles de la province.
Selon elle, les infrastructures devront être améliorées et plus d’employés devraient être mobilisés.
Nous avons géré la situation avec les ressources qu’on avait, mais ça ne peut plus être le cas. Il va falloir investir. […] [La pandémie] a mis en lumière à quel point nous devons investir dans ces domaines.
Somme toute, elle considère que la réponse de l’Ontario face à la COVID-19 a été raisonnable
, malgré l’arriéré de dizaines de milliers d’interventions chirurgicales en Ontario.
[La situation] aurait pu être bien pire. Nous n’avons pas submergé notre système de santé dans cette vague initiale de COVID-19 et pour moi, c’est un succès.
Elle croit que l’arrêt des interventions non urgentes était nécessaire pour permettre au système de santé de répondre à une crise dont l’étendue n’était pas connue.
Bien que ces procédures reprennent graduellement, certains experts estiment qu’il faudra des mois, voire plusieurs années, avant de rattraper le retard accumulé.
L’heure n’est pas au relâchement
À bien des égards, nous avons bien répondu. D’autres provinces ont fait mieux. […] Nous aurions dû être beaucoup mieux préparés
, croit le Dr Ross Upshur, de l’École de santé publique Dalla Lana, à l’Université de Toronto.
Nous devrions être raisonnablement satisfaits, mais suffisamment critiques, en particulier concernant notre réponse auprès des populations à risque. Ce qui s’est passé dans les foyers de soins de longue durée est inexcusable et l’impact disproportionné [du virus] sur les populations racialisées et à faible revenu est tout aussi problématique.
Récemment, les nouveaux cas de COVID-19 ont dévoilé une autre tendance. La majorité des nouvelles infections touchent les Ontariens de 20 à 39 ans, selon les données de Santé publique Ontario.

La hausse de nouveaux cas de COVID-19 chez les personnes de moins de 40 ans préoccupe les autorités sanitaires.
Photo : The Canadian Press / Graham Hughes
Nous avons un long chemin à parcourir et nous sommes loin d’être tirés d’affaire
, avance le professeur.
Les Ontariens devront rester sur leur garde pour éviter un scénario qui pourrait rapidement devenir catastrophique, selon lui.
La Dre Susy Hota ne pense pas que l’élimination du virus est un scénario réaliste. Selon elle, la santé publique sera capable de limiter la propagation de la maladie, mais pas de la faire disparaître.
98 % de l’Ontario est toujours vulnérable.
À l’approche de l’automne et de l’hiver, le Dr Ross Upshur s’inquiète pour les mois à venir.
Je ne suis pas sûr que tous les éléments d’un plan cohérent soient en place. Il y a encore beaucoup à apprendre
, conclut l’expert en santé publique.