En désaccord avec la création d’un transporteur aérien géré par le gouvernement québécois, la chef du Parti libéral (PLQ), Dominique Anglade, demande tout de même à Québec de garantir un minimum de services aériens aux régions de la province, et ce, à un prix raisonnable.

La décision d’Air Canada de suspendre indéfiniment 30 dessertes régionales et de fermer les escales aux aéroports de Gaspé, Baie-Comeau, Mont-Joli et Val-d’Or pourrait potentiellement mener à des situations catastrophiques dit-elle, et le gouvernement québécois doit donc absolument s’impliquer pour éviter que des régions se retrouvent isolées.

Pour elle cependant, la création d’un transporteur d’État n’est pas la solution à privilégier. Jeudi, le ministre des Transports du Québec, François Bonnardel, avait dit envisager toutes les possibilités, dont celle-là.

Je ne pense pas que ce soit le rôle du Québec de piloter des avions directement. […] Je ne crois pas qu’un gouvernement est la meilleure organisation pour gérer une compagnie aérienne.

Québec doit plutôt appuyer une solution qui permettrait aux transporteurs régionaux déjà existants de prendre une place plus importante dans l’offre de services aériens proposés aux régions, soutient Mme Anglade.

Une alliance devra toutefois aussi être réalisée avec les transporteurs nationaux, pense-t-elle, pour assurer que les prix ne soient pas exorbitants, comme ça a été le cas pendant de nombreuses années.

Dominique Anglade suggère donc la mise en place d’un comité permanent sur le transport aérien régional, qui pourrait décider des services minimums garantis aux régions et qui réfléchirait à des mécanismes permettant de réduire les coûts de ce transport.

Celui-ci devrait aussi s’assurer que soient instaurées les recommandations qui avaient suivi le Sommet sur le transport aérien régional qui a eu lieu en 2018.

Cette crise était prévisible, déplore-t-elle.

N’ayant pas de suggestion claire à proposer, Dominique Anglade suggère tout de même que Québec accorde plus de financement aux infrastructures aéroportuaires régionales.

La libérale ne s’est pas étendue sur les responsabilités qu’elle voudrait voir assumer par le gouvernement fédéral. Selon elle, même s’il est nécessaire de travailler avec le gouvernement fédéral pour obtenir des permis, par exemple pour permettre la mise en place de nouvelles routes avec de nouveaux transporteurs, le Québec se doit de prendre la direction du dossier.

Je ne conçois pas que l’on délègue au fédéral la responsabilité de l’application du territoire du Québec, a-t-elle lancé.

Trudeau espère un retour rapide du service

Aux journalistes qui lui demandaient ce qu’il pensait d’un éventuelle service de transport aérien gouvernemental au Québec, le premier ministre Justin Trudeau a déclaré que son gouvernement était aussi déçu de la décision d’Air Canada de couper des services en région.

Ce qui frappe au Québec, frappe aussi dans les Maritimes et ailleurs au pays. C’est donc quelque chose que nous sommes en train de regarder avec Air Canada et d’autres [transporteurs]. On espère qu’ils vont reprendre le service bientôt, a expliqué le premier ministre.

Air Canada profite des liens les plus profitables au pays mais on s’attend aussi à ce qu’il desserve les personnes qui vivent dans les régions plus éloignées, a ajouté Justin Trudeau.

Plus difficile pour le tourisme madelinien

Dominique Anglade pense également qu’il est essentiel que les demandes et les suggestions des autorités régionales soient examinées. Des représentants de son parti ont d’ailleurs discuté jeudi avec les différents maires concernés par l’annonce d’Air Canada.

La position libérale reflète très bien celle du maire des Îles-de-la-Madeleine, Jonathan Lapierre, qui dit ne pas demander à Québec de lancer un nouveau transporteur aérien, mais bien de financer ceux déjà existants.

Je ne pense pas que c’est le rôle de l’État d’opérer une entreprise aérienne, mais c’est certainement le rôle de l’État d’investir dans le transport aérien et d’exiger des niveaux de service de certains transporteurs avec des coûts maximaux pour les passagers, indique-t-il.

Même si les Îles-de-la-Madeleine ne seront pas privées complètement de transport aérien par la décision d’Air Canada, M. Lapierre s’inquiète pour l’industrie touristique du secteur. On monte aux barricades rapidement parce que c’est fragile. L’industrie touristique ici dure deux mois. Et c’est la seule industrie que nous avons avec la pêche , explique-t-il.

Et même si 80 % des touristes des Îles arrivent par bateau, l’autre 20 % qui se déplace par voie aérienne n’est pas à dédaigner, note-t-il encore. Selon lui, l’annonce d’Air Canada a déjà entraîné l’annulation de réservations prévues à l’automne.

La situation de monopole dans laquelle se retrouvera Pascan Aviation pourrait de plus faire augmenter le coût du transport aérien pour les consommateurs, craint-il, qui pourraient être tentés de choisir une autre destination.

Air Canada assurera une liaison directe par jour avec Montréal jusqu’au 7 septembre, uniquement pour la période estivale.

Quant à Pascan Aviation, qui possède de petits avions de 15 places qui devraient bientôt être remplacés par des appareils de 34 places, elle assure des vols à raison de deux ou trois fois par jour à destination de Québec et de Saint-Hubert, en banlieue de Montréal.

Un je-m’en-foutisme consternant

La FTQ estime de son côté que qu’Ottawa et Québec doivent faire comprendre raison aux gestionnaires d’Air Canada. La centrale syndicale reproche au transporteur de ne penser qu’à son fric et l’accuse de torpiller la relance économique régionale, en plein déconfinement.

La façon de faire d’Air Canada est cavalière et est empreinte d’un je-m’en-foutisme consternant , dénonce-t-elle.

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